Sur les toits, on pouvait tout voir. On avait une vue imprenable sur la ville, et en sautant de l’un à l’autre, il était alors possible de surveiller à peu près n’importe quel recoin sombre, n’importe quelle ruelle isolée. Jin s’était posté en hauteur afin de surplomber les rues et de pouvoir rapidement repérer la moindre agression, le moindre signe d’un crime en cours. Malgré tout ce qui s’était passé dernièrement, malgré l’absence de Ziendra, malgré le fait que sa mère était désormais au courant de ses activités de justicier hors la loi, il ne pouvait tout simplement pas rester les bras croisés à ne rien faire.

Il regardait ainsi en bas, fixant la ruelle d’un regard sombre, froid et déterminé. Il n’avait déjà pas l’habitude d’être tendre avec ses proies, mais depuis l’agression de Ziendra survenue quelques semaines plus tôt, il était sur les nerfs. Intérieurement, il était en conflit. Une part de lui voulait devenir plus brutal que jamais, ne reculant devant rien pour arrêter ces monstres que personnes d’autre ne semblait vouloir traquer, tandis qu’une autre parcelle de lui-même faisait encore résonner les mots de Shizen dans son esprit.

« L’amour est la voie, pas la colère. »

Pourtant, la voie de la colère est bien plus attrayante, bien plus directe. Tout comme Ziendra depuis sa rencontre avec le loup, ce dernier était en proie au doute. S’il avait dans un premier temps toujours refuser de tuer ceux qu’il combattait pour ne pas se rabaisser à leur niveau, voire pire, depuis cette fameuse nuit avec Takahashi, il ressentait au fond de lui un sentiment étrange. En repensant à la façon dont il avait tué son ancien patron, il sentait un léger frisson de satisfaction lui parcourir l’échine. Au final, plus il y repensait, plus il avait l’impression d’avoir aimé ça.

Se secouant la tête, il se remémora alors sa discussion avec sa mère. Quand il lui avait avoué sa nature de justicier, il avait pour la première fois ressentit de la culpabilité quant à son acte ce soir là. Jusqu’alors, c’était un simple regret qui l’animait. Le regret de n’avoir pas pu trouver une autre solution pour stopper Takahashi et sauver Ziendra. Mais quand il avait révélé sa vraie nature à sa mère, il s’était alors senti coupable, et honteux. Il lui avait tout dit, sauf ça. Si elle avait plus ou moins accepté le fait qu’il jouerait toujours les justiciers de l’ombre malgré son statut de hors la loi, il ne pouvait pas se résoudre à lui avouer qu’il avait tué deux personnes.

Retournant à sa patrouille, Jin constata avec surprise que la nuit était calme. Pas d’agression dans une ruelle mal éclairée, pas de braquage de banque, quelques bagarres à la sortie des bars. Rien qui nécessitait réellement son intervention. Pour les bras ou les boîtes de nuit, les vigiles étaient là pour faire leur job. Aussi, après de longues heures, Jin regarda sa montre. Trois heures du matin. Que devait-il faire ? Rester, continuer à patrouiller ? Ou bien rentrer ? Il repensa alors à sa dragonne, encore trop amochée tant physiquement que psychologiquement pour reprendre les patrouilles, sans parler du fait qu’elle n’avait toujours pas eu de rendez-vous pour lancer la procédure d’avortement.

Chaque fois qu’il réécoutait les mots de Ziendra sur ce sujet, il sentait son coeur se serrer. Non pas qu’il désapprouvait sa décision. Au contraire, elle y avait mûrement réfléchi, avait pesé le pour et le contre, analysé leur situation sous toutes les coutures et en avait déduis que donner naissance à un enfant maintenant n’était pas le bon choix à faire. L’avortement était la décision logique et rationnelle à prendre. Pourtant, Jin n’avait aucune envie de suivre la logique. Jin avait envie de suivre son coeur. Et son coeur lui hurlait de garder cet enfant, de le voir naître et de l’élever.

Il décida donc de rentrer, n’étant tout simplement pas capable de chasser ces pensées de son esprit. Ziendra serait sans doute en train de dormir quand il rentrerait, alors il attendrait son réveil pour avoir une conversation avec elle à ce sujet. Il reprit donc la route de l’appartement de la dragonne, qu’il rejoignit assez rapidement. Il reprit alors sa forme humaine à l’abri des regards pour ensuite entrer dans le bâtiment et se diriger vers son nouveau chez lui.

Il ouvrit la porte aussi discrètement que possible, la refermant ensuite avec tout autant de délicatesse. Il avança dans le salon, retira son manteau et son t-shirt qu’il jeta négligemment sur le canapé avant d’aller se servir un verre d’eau au robinet de la cuisine. Il bu lentement, laissant le liquide froid couler au fond de sa gorge et profiter de cette sensation agréable avant d’aller vers la chambre. Il fit alors coulisser lentement la porte, entra et rejoignit sa douce dans le lit.

Se glissant lentement sous la couverture, il passa ses bras autour de la taille de la jeune femme, et en la tenant par les hanches, il la ramena délicatement contre lui, l’enlaça alors tendrement avant de plonger son visage dans sa chevelure de rubis et de fermer les yeux, se laissant bercer par son odeur enivrante, la chaleur de sa peau et le bonheur de la sentir dans ses bras. Il caressa alors son bas ventre, pensa à la petite graine de vie qui s’y trouvait encore, et se disant à nouveau qu’il ne voulait pas perdre cette occasion. Puis il s’endormit, blottissant la jeune femme contre lui. Il attendrait le petit matin pour lui en parler, mais il avait fait son choix.

[Musique d'ambiance]:

En ouvrant les yeux, Jin avait la tête lourde. Il jeta un œil à son téléphone qui indiquait neuf heures du matin. Étant rentré vers trois heures, il n’avait donc dormi que six heures. Pour une personne normale, avec six heures de sommeil, on s’en sortait pas si mal, en général. Seulement, Jin était à moitié loup. Une sorte de gros chien. Et un chien, ça dort beaucoup. Six heures de sommeil, pour lui, c’était peu. Mais pas le temps de s’apitoyer sur son manque de sommeil. Il devait faire régner la justice, et ce devoir, cet objectif passait au dessus de ses intérêts personnels. Sans parler de Ziendra, qui depuis son agression était devenue une sorte de Saint Graal à ses yeux, quelqu’un qu’il devait protéger à tout prix.

Il se redressa lentement, observant la place vide à côté de lui, puis se sentant irrémédiablement attiré par la délicieuse odeur de viande cuite qui émanait de la cuisine. Se frottant les yeux et bayant bruyamment, donnant presque l’impression de pousser un rugissement étouffé, il sortit du lit sans prendre la peine d’enfiler un t-shirt, débarquant alors dans la cuisine en ne portant qu’un simple short de pyjama qu’il avait rapidement enfilé avant d’aller dormir. Frottant sa tête en passant sa main dans les cheveux, il eut à peine le temps de remarquer sa douce que la dragonne se blottissait déjà contre lui, humant son odeur corporelle comme si elle en était dépendante. Profitant de l’instant, il fit de même en plongeant son nez dans la chevelure flamboyante de sa bien aimée, l’enlaçant tendrement avant de se laisser embrasser et de se faire emmener à table.

Il la regarda alors faire, attendrit de la voir manger autant. Après tout, elle abritait en elle une petite graine de vie, il n’était donc pas étonnant de la voir manger davantage. Il fallait la nourrir pour qu’elle grandisse et se développe … Enfin, jusqu’à ce que Ziendra décide d’y mettre un terme. Cela faisait déjà un mois qu’elle était enceinte, selon les médecins. Or, même si le sujet avait longtemps été tabou au Japon, l’avortement avait aujourd’hui été légalisé, mais sous des conditions particulières, notamment concernant l’âge légal du fœtus au moment de l’opération. C’était un sujet et une situation compliquée, à laquelle Jin ne voulait voir qu’une seule solution : ne pas avorter. Garder cet enfant, le faire naître et l’élever. Perdu dans ses rêveries à s’imaginer en père de famille heureux, il fut sortit de ses pensées par Ziendra qui lui demandait comment s’était passée sa patrouille, entre autres.

« Oh … C’était plutôt calme, en tout cas dans les zones où j’ai patrouillé. Quelque bagarres d’ivrognes à la sortie de certains bars, des gros lourdeaux qui étaient un peu trop tactiles avec des filles devant des boîtes de nuit … Rien que les vigiles ou les gens présents ne pouvaient gérer par eux-mêmes. J’ai surtout tourner dans les différents quartiers, mais bizarrement, c’était une nuit plutôt calme. Ce qui n’est pas pour me déplaire. Et concernant nos individus mystères … Ceux qui sont responsable de ton agression, toujours rien. Pourtant, je cherche, je suis toutes les pistes que j’ai mais … » Jin soupira profondémment. « Sans l’aide de Shizen et de ses ressources, c’est beaucoup plus difficile que prévu. Mais je ne peux pas lui en vouloir de m’avoir mis de côté de son enquête. Il aurait été dans une situation très compliquée d’un point de vue légal, étant donné que je ne suis ni un héros ni un policier. »

Jin saisit alors le steak de bœuf qui trônait dans son assiette, souriant en constatant que Ziendra avait finalement retenu qu’il mangeait de la viande à toute heure de la journée, en raison de la nature de son alter. Il mordit fermement dans le bout de viande, arrachant à la seule force de ses canines un bon tiers du steak, le laissant avec un bonne partie de la viande pendant à l’extérieur de sa bouche. Jin regardait la viande, puis Ziendra, d’un air un peu surpris, puis avala goulûment sa pitance, déglutissant bruyamment. Il mangea le reste de son repas avec appétit avant de se frotter le menton en grimaçant.

« Hmmm … va encore falloir que je me rase. Ça fait seulement deux jours et j’ai déjà l’impression que ça repousse … » Jin poussa un nouveau soupir. « Cet alter me fatigue des fois. Si je ne me rase pas tous les jours, je risque vite de me retrouver couvert de fourrure … »

Guettant la réaction de Ziendra à cette dernière remarque, il observait la dragonne d’un regard attendrit. Le rouge de ses cheveux était si chatoyant qu’on aurait dit qu’ils étaient fait de fins filaments de rubis, tandis que le gris de sa peau faisait penser à une carapace d’acier trempé, bien en adéquation avec le caractère très renfermé de la jeune femme et sa capacité à endurer et encaisser. Mais c’étaient surtout ses yeux qui le fascinaient toujours autant. Deux ambres lumineuses, qui ne ressortaient que davantage au milieu de ce visage grisâtre, et qui semblaient comme envoûter Jin à chaque fois qu’il y plongeait les siens. Contemplant la beauté sans pareille de sa bien aimée, il ne put réprimer un sourire doux et attendrit avant de se lever pour prendre Ziendra par la main, l’invitant elle aussi à se redresser. Il la prit ensuite dans ses bras avant de l’embrasser pendant de longues minutes durant lesquelles aucun bruit de se fit entendre.

« Je t’aime. » lui susurra-t-il alors au creux de l’oreille.

Ce genre d’instants magiques, c’était typiquement ce que Jin aimait le plus. C’étaient ces moments là qui lui donnaient la force de continuer à se battre pour la justice, malgré les doutes qui l’envahissaient depuis quelques temps. Et pourtant, malgré le bonheur sans égal qu’il vivait en ce moment même, cette question, ce sujet ne quittait pas son esprit. Il détourna alors son regard de celui de sa dragonne, une expression de tristesse s’imprimant sur son visage tandis qu’il regardait au sol.

« Ziendra, je sais que tu as mûrement réfléchit à la question, et je sais aussi que je t’avais promis que je te suivrai quelque soit ton choix, mais … Je ne peux pas. » Jin marqua une pause. « Je ne peux pas te laisser prendre cette décision comme ça. Je ne veux pas qu’on abandonne cet enfant. J’ai envie de le garder, de le voir naître et grandir, de l’élever … Ziendra, je veux fonder une famille avec toi. »

[Musique d'ambiance]:

Jin entendait les raisons qui poussaient Ziendra à refuser de garder l’enfant, et elle n’avait pas tort. Sans parler des problèmes économiques que cela allait engendrer pour leur couple, la dragonne marquait un point : suite à l’agression de cette dernière, ils étaient potentiellement devenus des cibles à abattre pour certains criminels. Ils n’avaient eu de cesse depuis leur rencontre, et même bien avant cela, de donner des coups de bottes dans chaque termitière qu’ils avaient croisées, alors il n’était pas surprenant que certaines termites décident de se venger. Mais Ziendra avait également raison sur un autre point : tout comme elle, Jin serait incapable d’abandonner ses rondes de nuits. Or, avoir un enfant lui rendrait la tâche bien trop compliquée. Tout comme Ziendra semblait derrièr ses questions rhétoriques affirmer qu’elle ne se sentait pas prête à abandonner son rôle de justicière de l’ombre, Jin ne se voyait pas non plus capable de tout laisser derrière lui, surtout maintenant qu’il avait ferré un beau morceau avec le Léviathan.

« Tu as raison … Je le sais bien, garder cet enfant ne nous causerait que d’autres problèmes qui viendraient s’ajouter à ceux qu’on a déjà … et au final, on ne lui rendrait pas service, à cette graine de vie. Mais pourtant … Pourtant au fond de moi, je n’arrive pas à me débarrasser de cette pensée ! Comme si on avait une occasion en or d’enfin construire quelque chose de merveilleux, d’unique, et qu’on allait la gâcher à jamais ! »

Jin se prit alors la tête dans les mains, appuyant ses coudes sur ses genoux et se penchant en avant, complètement rongé par le conflit moral et éthique qui faisait rage en lui. Il le savait pourtant : ce n’est pas qu’ils ne voulaient pas tous les deux de cet enfant, ils ne le pouvaient tout simplement pas. Le faire naître dans un tel contexte serait un acte immonde aux yeux du jeune homme, exposant ainsi son enfant aux dangers d’une vie qu’il n’aurait pas choisi, risquant la vie qu’ils auraient alors décidé de mettre au monde et d’élever. Une vie dont ils auraient la responsabilité. Et alors qu’il était en proie à un conflit interne, sa belle lui annonça une nouvelle qui fit l’effet d’une bombe en lui.

« Tu … le tournoi des vilains ? »

Jin releva alors la tête lentement, regardant la dragonne qui détournait les yeux, une expression de honte lui voilant le visage. Sans dire un mot, Jin prit alors une des mains de Ziendra dans la sienne, et posa l’autre sur la joue de sa bien aimée, tournant délicatement son visage vers lui, afin de croiser à nouveau son regard. Il avait peur, il était en colère. Elle le lui avait caché, elle avait mentit, et elle s’était mise dans une situation très dangereuse, mais lui aussi avait des torts, lui aussi n’était pas parfait. Il la tira alors lentement dans ses bras pour l’enlacer, toujours sans un mot, restant ainsi de longues minutes. Il caressait le dos de sa douce, fermant les yeux et profitant de l’instant. Sa chaleur, son odeur, sa présence le rassuraient, l’apaisaient, et lui faisaient se dire qu’il ne voulait les perdre pour rien au monde. Il défit alors l’étreinte et la fixa droit dans les yeux.

« C’était donc pour ça, cet entretien avec un membre de la Ligue ? Ou bien tu avais sérieusement songé à les rejoindre ? » Jin marqua une pause. Son visage n’affichait pas un air grave, bien qu’il se sentait en partie en colère face aux décisions de sa belle, mais il faisait des efforts pour ne pas trop le montrer, ne voulant pas que cette dernière ne se ferme. « Ziendra, je mentirais si je te disais que je ne me sens pas un peu … floué. Sans parler de trahison, tu as quand même approché la Ligue ! La Ligue Ziendra ! Ceux-là même qui représentent tout ce que l’on veut combattre ! Comprends moi bien, je t’en veux, oui. Mais par dessus tout, j’ai peur pour toi. C’est un tournoi clandestin, qui sait ce qu’il pourrait t’arriver là bas ? Et je ne serai pas là pour venir à ton secours si tu as besoin de moi. »

Jin avait du mal à rester calme. Il tremblait légèrement, mais faisait de son mieux pour se contrôler, bien que cela devenait de plus en plus difficile. Mais pourtant, il y parvenait. Il repensait en effet aux paroles que Shizen lui avait adressées sur le toit de l’hôpital. « L’amour est la voie, pas la colère. » Alors il s’efforçait de ne penser qu’à cela. Son amour pour Ziendra, tous ces moments intimes, doux et passionnés qu’ils avaient partagés, ce bonheur qu’elle faisait naître en lui. Il sentait bien qu’au fond de lui, la moindre étincelle pouvait démarrer un véritable brasier incontrôlable, mais l’amour qu’il éprouvait pour la dragonne parvenait tant bien que mal à l’en empêcher.

Il lâcha alors les mains de Ziendra et se leva, avançant vers la fenêtre et regardant au loin, en silence. La situation était devenue encore plus compliquée, et il étai clair à présent que garder l’enfant serait un fardeau de trop. Se résignant, Jin soupira et adressa à la dragonne quelques mots, sans pour autant détourner son regard de la fenêtre.

« Je comprends mieux maintenant. C’est entendu, nous ne garderons pas cet enfant. Tu as raison, ce serait beaucoup trop risqué, pour lui comme pour nous, qu’il vienne au monde maintenant. Et puisque tu participes à ce tournoi … »

Jin marqua une pause, puis prit son nouveau long manteau de couleur noire, qui remplaçait l’ancien perdu lors de leur affrontement avec Takahashi et ses sbires. Il fouilla dans l’une des poches intérieure pour en sortir une petite boîte et se tourna alors vers Ziendra, toujours assise sur le canapé. Il avança de quelques pas pour se retrouver vers elle, la toisant du regard.

« C’est trop tard pour t’empêcher d’y participer, mais j’y pose tout de même trois conditions. La première, c’est que tu fasses preuve d’une prudence extrême. Ne joue pas les têtes brûlées et ne prends pas de risques inutiles. Je ne veux pas te perdre, Ziendra. La deuxième, c’est que tu profites de cette occasion pas seulement pour tabasser de la vermine, mais aussi pour essayer d’en apprendre le plus possible sur les différentes raclures qu’on traque. Mais toujours en prenant le minimum de risques possibles. Et enfin, la troisième condition … » Jin mit alors un genou à terre et tendit la boîte vers Ziendra, l’ouvrant et révélant ce qu’elle contenait : une bague. « … Ziendra, tu veux bien partager ma vie et devenir ma femme ? »

[musique d'ambiance]:

Au premier abord, Jin cru avoir fait une grosse erreur en lui faisant sa demande, vu que Ziendra semblait totalement perturbée, comme si une bombe d’émotions avait exploser en elle et avait mis sans dessus dessous son équilibre psychique encore assez instable suite à son agression. Quand elle vint coller son front au sien, l’insultant de tous les noms possibles et inimaginables, il crut bel et bien que leur relation allait s’écrouler comme un château de cartes. Mais finalement, la dragonne se laissa tomber de sa chaise pour atterrir dans les bras du loup, pleurant de joie en lui répondant en sanglots. De tout ce qu’elle put lui dire, Jin ne retint qu’un seul mot : oui.

Il lui enfila alors la bague au doigt, ne percevant plus rien par aucun de ses sens que leurs deux êtres au milieu de ce petit appartement modeste. Le monde autour n’existait plus. Leurs peurs, leurs problèmes, leurs idéaux, leur quête de justice … Tout ça avait disparu en un éclair, balayé par la tornade de bonheur qu’il avait lui-même invoqué en ployant simplement le genou. Puis elle l’embrassa comme jamais elle ne l’avait fait. Un baiser lourd de sens. Par ce baiser, auquel il répondit sans hésiter, les deux jeunes amants venaient de sceller leur destin. Par cette demande, cette bague et ce baiser, il était à présent clair pour eux deux qu’ils passeraient leur vie ensemble, quoi qu’il pouvait se passer. Elle lui promettait une vie de famille heureuse, emplie de bonheur, un mariage grandiloquent, d’être sienne … Alors il sourit, des larmes de joies coulant sur ses joues.

« Ziendra, tant que tu es à mes côtés, je serai l’homme le plus heureux de ce monde. Je ne te demanderai jamais rien d’autre que de toujours te tenir près de moi. N’oublie pas, quelques soient les obstacles que la vie nous enverra, nous les franchiront ensemble. Dès aujourd’hui et à jamais, je suis tien et tu es mienne. Même la mort ne nous séparera jamais. Je t’aime Ziendra. »

Il l’embrassa alors passionnément, et les deux amants se laissèrent aller à leur amour fougueux et ardent, Jin soulevant sans peine la dragonne pour l’emmener dans la chambre à coucher … Plusieurs heures plus tard, ils étaient tous les deux allongés dans le lit, dans leur plus simple appareil, sous les draps. Le jeune homme avait son bras autour de la jeune fille, la blottissant contre son torse nu et encore trempé de sueur. Il fixait le plafond, sa tête tournait. Il se sentait léger, capable de tout, comme sur un nuage. Dans ses bras, la chaleur de Ziendra le remplissait d’une sensation de bonheur sans égal, et il aurait voulu que cet instant dure pour l’éternité. À ce moment précis, elle était tout.

Il plongea alors son nez dans les cheveux de rubis de sa belle, humant son parfum, puis de son bras libre, la tira délicatement pour la faire passer au dessus de lui, la jeune femme se retrouvant alors allongé sur le jeune loup, qui la dévorait du regard en souriant. Jamais il ne pourrait se lasser de ce regard. Ces yeux jaunes, qui brillaient sur ce visage à la couleur du charbon comme deux pièces d’or reflétant un rayon de soleil qui venait le frapper en plein coeur, l’emplissant de cette béatitude sans pareil. Alors, pour lui faire ressentir qu’une once de la reconnaissance qu’il lui témoignait pour l’aimer, il l’embrasser avec une douceur extrême, pendant de très longues minutes, tout en caressant son corps nu de ses mains avec tout autant de délicatesse. Puis, une fois cet instant magique fini, il fixa de nouveau son regard.

« En un seul mot, tu as fait de moi le plus heureux des hommes. Je t’aime. »

Jin la serra à nouveau contre lui, profitant encore longuement de leur intimité, avant de finalement se redresser et de se rhabiller. Il se tourna alors vers la dragonne, un grand sourire aux lèvres.

« J’ai quelques courses à faire, et je pense que je vais aussi passer voir ma mère pour lui annoncer la nouvelle. Je ne serai pas long, c’est promis. Ce sera l’affaire d’une petite heure, au grand maximum. Mais tu peux m’accompagner, si tu le souhaites. »

Jin enfilait alors son t-shirt, puis ses chaussures, assis au bord du lit. Aujourd’hui, il n’avait pas envie d’être The Wolf, le justicier hors la loi qui patrouillait la nuit dans les ruelles sombres pour arrêter les criminels, il voulait simplement être Jin, ce jeune homme qui venait de demander la femme qu’il aimait en mariage et qui se sentait alors comme l’homme le plus heureux du monde. Une fois ses deux chaussures enfilées, il se tourna alors vers Ziendra.

« Alors, tu m’accompagnes ? »