XX Mai 2XXX
Le vrombissement du moteur.
Des oiseaux qui s’envolent à chaque coups.
Le reflet rougeâtre du jus de raisin au soleil.
Cela fait maintenant 4 mois que j'erre sans réel but dans cette pseudo clinique de réhabilitation entre les alcooliques, les drogués et les anciens criminels ayant purgés leur peine.
Le personnel prétend pouvoir me soigner. Pouvoir m’aider à devenir quelqu’un et pourtant, je n’ai pas l’impression d’avoir ma place ici. Personne ici n’a connu ce que j’ai connu. Personne ici n’a fait face aux démons que j’ai affronté.
Avec l’arrivée du printemps, les seuls passe-temps qui ont su calmer mes pensées sont le jardinage et les échecs … La première activité peut être effectuée seul, bien que je sois rarement sans supervision, quasiment tous les jours. La seconde elle … est plus complexe. Le seul adversaire avec lequel je m’entends bien est une lycéenne qui fait du bénévolat. Chaque samedi, elle vient à la même heure. Chaque samedi on joue ensemble et chaque samedi elle finit par partir.
Son optimisme et sa bonté d’âme m'énervent. J’ai l’impression qu’elle me traite comme un chiot handicapé et pourtant, c’est peut-être bien la seule qui arrive à m’aider à me reconstruire. La seule qui me motive à me lever chaque matin et qui me force à attendre patiemment la fin de semaine prochaine.
Avant ça j’étais seul. Perdu. Je n’avais aucune idée d’où aller. Je n’avais qu’un seul objectif. Combler ce manque en moi. Maintenant, ça va faire presque 3 heures que j’attends patiemment au soleil. Ce petit brin de femme à réussi à m’apprendre la tempérance, le calme et la planification mais surtout, elle m’a apprit à avoir de l’ambition mais quand je l’attend, le temps passe toujours aussi lentement.
J’entends encore quelques fois l’appel de la machine. Ce hurlement cinglant au fond de moi qui m’ordonne de me venger mais j’arrive à me retenir. La plupart du temps. Bien que cela fait un peu plus d’un mois depuis ma dernière crise de colère, la bête est toujours là. Je le sais.
Lorsqu’elle arrive, notre rituel est toujours le même. Elle m’appelle Licorne. Cours dans mes bras. Manque de me renverser de ma chaise. Elle prend position en face de moi et pendant qu’on joue, elle me raconte sa semaine et me demande de parler de la mienne en retour.
C’est agréable.
Mais vide.
A chaque fois qu’elle me quitte. La chaleur qu’elle m’apporte reste avec moi quelques heures mais fini toujours par partir.
Je suis coincé dans un cycle.
Toujours dépendant de ce vide qui ne demande qu’à être comblé. Peut-être ne suis-je pas si différent que ça des autres en fin de compte ?
Je dois me concentrer. Je dois trouver une couleur.
Le blanc.
L’incarnation du calme. De la sérénité et de l’infinité.
De la mort.
Non. Il doit y avoir autre chose. Ferme les yeux. Respire. Visualise la jeune fille. Expire.
Calme.
Que ferais-je lorsqu’elle m’abandonnera elle aussi ? La boucle sera-t-elle brisée ? Serai-je quelqu’un de nouveau ? Serai-je enfin sourd à l’appel assourdissant du moteur ? Je l’ignore mais tout ce que je veux, c’est que les gens me respectent. Je suis loin d’être un canon de beauté et je suis loin d’être aussi fort que les héros là-dehors … La seule chose que les gens ressentent en me voyant c’est la peur … et les gens finissent par respecter ce qui fait peur non ? Peut-être devrais-je succomber à la bête un jour … En attendant, je dois attendre qu’Elle arrive. Pour le moment. C’est ce qui me suffit.
L’ambition … Quel concept étrange …
A écrire. - Histoire.